Aumônerie Catholique de Mourmelon
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-932 à -587: Le royaume du sud
LE ROYAUME DU SUD (JUDA)
 
 
 
JUDA ET ISRAEL, FRERES ENNEMIS
 
 
LE SUD : PETIT ET NERVEUX
 
            "Royaume" est un bien grand mot pour désigner cette petite province de Juda blottie en grande partie dans la montagne autour de Jérusalem. Un territoire exigu: à l'Ouest, la mer Méditerranée, à l'Est: le désert, au Sud: le désert, au Nord, le royaume frère ou ennemi: Israël. Juda est plus pauvre, plus petit et moins peuplé qu'Israël. Mais ce petit pays a du nerf et des atouts non négligeables: une population homogène, une unité géographique assez facile à défendre, une capitale reconnue par tous, un temple fréquenté par tous, une tradition séculaire, une foi commune en Yahvé, une dynastie royale stable.
 
 
LUTTE FRATRICIDE ET ENTENTE CORDIALE
 
            Après la séparation des deux royaumes en 932, les rapports entre Israël et Juda sont tendus pendant un demi-siècle. Mais aux luttes fratricides succèdent une période d'entente cordiale puis des fluctuations politiques au gré de la situation internationale. Au commencement du 8ème siècle, grâce à l'affaiblissement des grands voisins, les deux royaumes relèvent la tête. On assiste à une vraie "renaissance" dans le Nord et dans le Sud. L'agriculture, le commerce et même l'industrie se développent. Les territoires occupés sont reconquis. Cette prospérité entraîne aussi l'aggravation de la situation sociale.
 
            A partir de 745, tout va changer. Teglath Phalasar III prend le pouvoir en Assyrie et entame une réforme.
 
 
INTERVIEW D'UN HABITANT DE JERUSALEM
 
 
            Rendons-nous à Jérusalem. Pénétrons dans la ville. Aux abords du palais, nous rencontrons un jeune homme, Isaïe, fils d'Amos. Il habite la capitale. Il est originaire d'une grande famille. Son allure et son langage ne se trompent pas. Nous sommes en face d'un fils de l'aristocratie. Il doit avoir 25 ans. Mais il est bien au courant de ce qui se passe dans son pays. Posons-lui quelques questions.
 Gravure Gustave Doré la Bible Ancien Testament Isaïe
 
QUELLE EST LA SITUATION SOCIALE ?
 
            "Le pays est plein d'argent et d'or" (Isaïe 2, 7). Mais cette richesse ne sert pas à tous. Inutile de faire de grands discours. Regardez autour de vous ! "Voyez ces champions de cocktails" (5, 22). "Dès le matin, ils courent après les boissons fortes et le soir ils s'attardent excités par le vin". (5, 11). Regardez les grandes dames de la capitale ! "Elles vont le cou tendu et les yeux provoquants. Elles avancent à petits pas et font sonner les anneaux de leurs pieds" (3, 16).

            Pour en arriver là, tous les moyens sont bons. "Ils accaparent les richesses. Ils ajoutent maison à maison et champ à champ, au point de prendre toute la place" (5, . La corruption bat son plein. "Pour un pot de vin, ils acquittent les coupables et retirent le droit à 'homme droit (5, 23). Ils tournent les lois dans leur sens "ces législateurs de lois injustes, ces scribes aux décrets oppresseurs qui refusent la justice aux faibles et frustrent le droit des pauvres pour faire des veuves leur proie et pour spolier les orphelins"
(10, 1). Il faussent les consciences et "appellent le mal bien et le bien mal" (5, 20).
 
 
COMMENT VOYEZ-VOUS L'AVENIR ?
 
            La situation internationale n'est pas rose non plus. La puissance assyrienne devient menaçante à l'Est. L'avenir s'annonce terrible. Ce sera l'invasion (5, 26), le feu (5, 24), la mort (4, 25), la captivité. Tenez, les dames que vous avez vu passer tout à l'heure, pour elles, tout va changer (Isaïe 3, 24). Mais tout espoir n'est pas perdu. Il y aura des rescapés pour "survivre à Jérusalem" (4, 2-3).
 
 
ET VOUS ISAIE, LA DEDANS ?
 
            J'habite au milieu de ce peuple. Je fréquente le roi et les hauts personnages de l'Etat. Je suis marié. J'ai donné à mes deux enfants des noms symboliques, le premier s'appelle "un reste reviendra" et signifie l'espoir, le second s'appelle "prompt butin, prompt pillage" et signifie la destruction. Comme moi, "ils sont des signes et des présages pour Israël" (8, 18). J'aime bien ma ville Jérusalem. Je ne puis imaginer que son temple soit détruit un jour. N'est-ce pas la demeure de Yahvé ? Mais l'exploitation des petits me choque. Ca ne peut durer.
 
 
TOUS UNIS CONTRE L'ASSYRIE
 
            En 735, la crise est là. Isaïe aussi. L'Assyrie menace d'engloutir tous les pays voisins. S'ils restent isolés, ils sont impuissants. Le roi de Damas l'a compris. Il organise une coalition anti-assyrienne regroupant les villes de Tyr, de Sidon, Gaza, le pays des Philistins, le royaume d'Edom, la reine des Arabes. Le roi d'Israël (Nord) refuse d'y entrer. Qu'à cela ne tienne ! Il est assassiné et remplacé par un roi décidé à participer à la coalition (2 Rois 15, 25).
 
 
SAUF JERUSALEM !
 
            Reste le royaume de Juda (Sud). Va-t-il se joindre aux coalisés ? Achaz, roi de Jérusalem refuse obstinément. Mais les coalisés ne se donnent pas pour vaincus. Leur plan est simple: foncer jusqu'à Jérusalem, supprimer le roi Achaz et le remplacer par un nouveau roi qui marchera avec eux. Un coup semblable avait déjà réussi dans le Nord.
 
            Le petit royaume du Sud est attaqué de toutes parts pas les coalisés. Les Philistins guerroient dans la plaine. Les Edomites s'emparent du port d'Eylat. Les troupes du roi d'Israël et du roi de Damas envahissent le pays par le Nord ; le roi Achaz se porte à leur rencontre. Ses troupes subissent une écrasante défaite. La guerre est meurtrière pour le peuple : destruction des villages et des récoltes, blessés, morts, prisonniers par milliers destinés à l'esclavage loin de chez eux.
 

LE ROI SACRIFIE SON FILS
 
            Jérusalem est en danger. La dynastie de David est menacée. C'est une vraie guerre des nerfs. On chuchote déjà le nom de celui qui doit remplacer le roi Achaz : "le fils de Tabeel" (Is 7, 6). "Le cœur du roi et le cœur du peuple se mettent à palpiter comme palpitent les arbres de la forêt sous le vent (Is 7, 2).
 
            C'est probablement alors que le roi Achaz de Jérusalem fait un geste de désespoir. Peut-être s'est-il souvenu de ce qu'il était arrivé au roi de Moab. Celui-ci, alors en guerre contre les Israélites se trouva dans un situation sans issue. Que fit-il ? Il prit son fils qui devait régner après lui et l'offrit en sacrifice sur le rempart" (2 Rois 3, 27). Le résultat fut efficace. Ce geste sanglant provoqua la colère du peuple de Moab et le départ précipité des assaillants. Comme le roi païen de Moab.
 
            Achaz roi de Juda, successeur de David, décide d'offrir son fils en sacrifice. "Il le fait passer par le feu" (2 Rois 16, 3). Par ce geste même, il supprime l'héritier du trône. Il met fin à la lignée de David. Il fait fi des promesses faites à David et à sa descendance.
 
 
UN AUTRE FILS VA NAITRE
 
            A Jérusalem, c'est l'affolement. On prépare le siège et la bataille. On répare les remparts. On affûte les armes. Le roi Achaz, la mort dans l'âme, inspecte les points stratégiques. C'est là que le prophète Isaïe le rejoint avec son fils qui s'appelle "un reste reviendra". Que lui dit-il ? Quelquechose de très simple que l'on chargera de plus en plus de sens au fur et à mesure des relectures :
 
            Une jeune femme est enceinte. Elle va enfanter un fils. Elle lui donnera le nom de "Dieu avec nous". "Avant même que cet enfant sache choisir le bien du mal, la terre dont tu redoutes les deux rois sera abandonnée"(voir Isaïe 7, 1-25). Pour le roi c'était clair : il vient de tuer l'héritier. Isaïe lui annonce la naissance d'un nouvel héritier. La reine est enceinte. La dynastie de David continue. N'est-ce pas le signe que Dieu est avec nous ? Les rois de Damas et de Samarie au contraire vont être écrasés par le rouleau compresseur assyrien. Mais Isaïe a beau parler, le roi sait déjà ce qu'il va faire. Il va se soumettre au roi d'Assyrie (2 Rois 16, 10-18).
 
 
CAUSE TOUJOURS, PROPHETE !
 
            Les années qui suivent sont pénibles pour Isaïe. Il se retire. Il regroupe et forme des disciples
(8, 17). Dix ans plus tard la ville de Samarie tombe aux mains de l'Assyrie. Le royaume du Nord est rayé de la carte. Les réfugiés arrivent à Jérusalem.
 
            716 : Jérusalem a un nouveau roi. Pour Isaïe, c'est le quatrième, Ezechias. Celui-ci entreprend une réforme religieuse rigoureuse. Isaïe reparaît alors publiquement. Il prend probablement part à cette réforme. Il devient une sorte de prophète officiel. Il fait figure d'éminence grise auprès du jeune roi (Is 28,14-28 ; 29, 13-24). Mais cela ne durera pas. Ezechias se lance dans une politique d'alliance avec les deux grands ennemis de l'Assyrie , la vieille Egypte et la jeune Babylonie (Is 3à, 1-7 ; 31, 1-3 ; 39). Isaïe s'oppose énergiquement à cette politique. Paroles en l'air ! Le roi n'en fait qu'à s guise. Plus Isaïe parle, plus il a l'impression de boucher les oreilles du roi afin qu'il n'entende pas. Il comprend mieux ce pourquoi il se sent appelé. (Voir par exemple IS 6, 8-13).
 

UN PETIT TOUR A LA CAMPAGNE
 
 
            L'air est lourd à Jérusalem. Quittons la capitale pour faire un tour à la campagne. Quittons ceux qui semblent décider de l'avenir du pays pour rejoindre ceux qui produisent le blé pour le pain, les olives pour l'huile, le raisin pour le vin, les fruits, la viande, le lait, le fromage. Rejoignons ces milliers de travailleurs qui forment la grande majorité du peuple d'Israël : des petits propriétaires, des ouvriers agricoles, des bergers, des artisans de village. C'est sur leur travail que repose la prospérité des grands.
 
 
MORESHET
 
            Nous laissons sur notre gauche la route de Béthléem, la ville d'où vient la famille royale (David). Nous descendons la montagne vers l'Ouest. Nous traversons une région de collines. Sur les sommets, çà et là, des petites villes entourées de murailles. Aux pieds des collines devant nous s'étend une large plaine jusqu'à la Méditerranée.
 
            C'est le soir, les paysans rentrent des champs. Ils regagnent leur village. Suivons un groupe. Entrons, nous y sommes accueillis selon les lois de l'hospitalité orientale. Nous sommes à peine à 35 km de Jérusalem. Mais, nous avons l'impression d'être tellement loin des problèmes de la capitale. Les ouvriers agricoles reçoivent leur salaire journalier. Chacun se retire chez lui. On se croirait dans un monde sans histoire. Et pourtant...
 
 
MICHEE DE MORESHET
 
            Michée, le prophète du village va nous aider à ouvrir les yeux. Car il y un prophète à Moreshet ! Le voici. Il n'a rien d'un Isaïe. C'est un homme de la terre. Sa parole est rude. Pleine d'images des champs et des bois. Un prophète en sabots. Il se sent souvent seul devant son peuple dont il partage pourtant les joies et les peines. Il se sent toujours seul devant les grands de son peuple. Ceux de Moreshet, mais surtout ceux de Jérusalem. Mais il tient le coup ( Mi 3, . Il est bien conscient que même si Jérusalem est loin, la vie et le sort des villages du "bas pays" sont liés à la capitale.
 Gravure Gustave Doré la Bible Ancien Testament Michée exhorte Israël à la pénitence
 
ILS DEVORENT LA CHAIR DE MON PEUPLE
 
            En effet, à Moreshet comme à Jérusalem, le jeu normal des institutions permet à une classe de riches propriétaires d'agrandir leurs domaines de jour en jour. "Ils convoitent des champs. Ils s'emparent des maisons. Ils saisissent le maître avec sa maison, l'homme avec son héritage" (2, 2). "Pour un rien ils extorquent un gage écrasant" (2, 10). "Ils dévorent la chair de mon peuple. Ils lui brisent les os" (3, 3).
 
            Comme tout Israélite, Michée est allé à Jérusalem prier au temple de Yahvé? Ce qu'il a vu à cette occasion l'a scandalisé. Devant le luxe et la richesse de la capitale, il se souvient du travail pénible de ses compatriotes. Il connaît des gens qui ont dû se vendre à d'autres qui s'enrichissent, pour pouvoir survivre. En voyant les remparts solides de la capitale, il se souvient de son village qui a été détruit maintes fois par les guerres. Il est écœuré par la corruption des juges et des prophètes. C'est pourquoi il nous lance à la figure des phrases inédites : "Ces belles constructions de Jérusalem, c'est le sang du peuple !" (9, 10). "Si les prophètes ont quelquechose entre les dents, ils disent "paix" mais à qui ne leur met rien dans la bouche ils déclarent la guerre" (3, 5). "Le péché du pays, c'est Jérusalem" (1, 5).
 

GARE A TOI, JERUSALEM
 
            Quel est donc ce malheur entrevu par Michée ? "La ville sainte deviendra un champ qu'on laboure. Jérusalem sera un tas de décombres" (3, 12). Jamais Isaïe l'aristocrate ne nous avait parlé ainsi. Pour lui les promesses de Yahvé étaient liées à la capitale. Jérusalem était la ville de David. Envisager la destruction de Jérusalem aurait été la remise en cause des promesses faites à David.
 
            Michée a plus de recul. Rien ne l'attache viscéralement à Jérusalem, bien au contraire. Il n'est aucunement gêné pour déconnecter de Jérusalem les promesses faites à David. D'ailleurs Jérusalem n'est pas la ville de David. C'est seulement sa capitale. Sa ville est située dans la campagne.
 
            A deux heures de route de Jérusalem : Béthléem. C'est là que David est né. Michée rattache l'espérance du peuple à cette petite bourgade rurale : "Quant à toi, Béthléem, la féconde, petite parmi le clan de Juda, c'est de toi que sortira celui qui doit gouverner Israël" (Mi 5, 1).
 
 
GARE A TOI, TEMPLE DE YAHVE
 
            Michée va encore plus loin. Non seulement il attaque Jérusalem. Non seulement il démystifie la capitale. Il est le premier - et un des rares prophètes - à oser s'attaquer au temple de Jérusalem et à annoncer sa destruction : "la montagne du temple deviendra une hauteur boisée" (3, 9-11). Ces paroles audacieuses marquent profondément ses contemporains. Comment peut-on envisager la destruction de la demeure de Dieu parmi son peuple ?
 
            Avant de quitter Moreshet, je note sur mon carnet une phrase qu'il a lancée à ceux qui croyaient se sauver en allant offrir de nombreux sacrifices au temple : Mi 6, 8.
 
 
701 : DE NOUVEAU LA GUERRE
 
            Après la mort de l'empereur d'Assyrie, les peuples soumis essayent de relever la tête. Mais le nouvel empereur Sennacherib ne se laisse pas faire. Dans une campagne victorieuse, il envahit Juda. Une fois de plus le pays est à feu et à sang. Les champs sont dévastés. Une grande plainte s'élève de la campagne (Mi 1, 8-16). Mais Jérusalem tient bon. Pendant le siège, Isaïe intervient une dernière fois. Il a 65 ans. Il annonce la délivrance de Jérusalem et le départ de l'assaillant. En effet, pour une raison imprévue l'armée assyrienne lève le siège et retourne dans son pays.
 
 
UN ESSAI DE REFORME, JEREMIE
 
 
            Les années qui suivent le long règne de Manassé ont laissé un souvenir pénible. Manassé "remplit de sang la capitale" (2 Rois 21, 16). Alors que son successeur Amon vit encore, dans un petit village près de Jérusalem, naît Jérémie. Avec lui, nous allons vivre les dernières années de Juda.
 Gravure Gustave Doré la Bible Ancien Testament Jérémie dicte ses prophéties à Baruch
 
UN VILLAGE MAUDIT
 
            Anatot ! Un nom inconnu aujourd'hui. Un nom bien connu par les contemporains de Jérémie. A cette époque si, par hasard, il vous était arrivé de rencontrer un habitant d'Anatot, il vous aurait certainement dit : "Réfléchissez bien avant de continuer à me parler. Il faut que vous le sachiez. Je suis d'Anatot ! Maintenant libre à vous d'arrêter la conversation". Mais d'où venait donc ce complexe ? Quel est le mystère qui pèse sur Anatot ?
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            Anatot était une des 48 bourgades réservées aux Lévites et aux prêtres. Dans ces villages, les bergers, les petits paysans se transformaient deux ou trois fois par an en serviteurs du temple. A leur tour, ils montaient à Jérusalem. Ils y remplissaient les fonctions du culte. Ils sacrifiaient, chantaient, priaient. Puis ils retournaient dans leurs villages auprès de leur femme et de leurs enfants. Ce n'était plus le cas à Anatot. Car, à la différence des 47 autres bourgades sacerdotales, Anatot avait une histoire. Elle marquait profondément les consciences.
 
            Anatot était un lieu d'exil. Trois siècles auparavant, une grande famille sacerdotale y fut reléguée par le roi Salomon pour complot contre la maison royale. Cette famille et ses descendants furent destitués des fonctions sacerdotales. Mais dans l'esprit des contemporains, cet exil était tout autre chose qu'une sanction royale. C'était la réalisation d'une parole de Dieu prononcée contre les ancêtres de cette famille qui, vers 1150, avaient abusé de leurs droits sacerdotaux au vieux sanctuaire de Silo : "Salomon exclut Ebyatar du sacerdoce de Yahvé, accomplissant ainsi la parole que Yahvé avait prononcée contre la maison d'Eli à Silo" (1 Rois 2, 27).
 
            Anatot était donc le lieu de résidence forcée d'une famille sacerdotale privée de son emploi et punie par Dieu lui-même. Il est impossible de dire si Jérémie faisait partie de cette famille. Mais il est sûr qu'il a été marqué par cette "malédiction" qui pesait sur son village. D'ailleurs, ses parents s'opposeront de toutes leurs forces à ce qu'il aille prophétiser à Jérusalem. Pour un habitant d'Anatot, cela ne se fait pas!
 
 
UN JEUNE ROI ET UN JEUNE PROPHETE
 
            En 640, le roi Amon est assassiné. Le peuple reconnaît son fils Josias comme roi. Mais il est trop jeune pour régner. A la même époque, la puissance assyrienne commence à décliner. Dans le royaume de Juda, le parti anti-assyrien releva la tête. Il était farouchement nationaliste , attaché au culte de Yahvé. Il a ses hommes au conseil de régence. Il influence l'éducation du jeune roi. Lorsque Josias prend le pouvoir en 628, sa ligne de conduite est claire. Premièrement : le nationalisme. Il veut se détacher de l'Assyrie et rêve de refaire le royaume de David. Deuxièmement : le retour à la religion traditionnelle, le culte exclusif du Dieu national Yahvé. Dès 627, il refuse de payer le tribut à l'Assyrie. Pas de réaction. Il va plus loin. Il entreprend la suppression méthodique des cultes étrangers au moins dans la capitale. (On trouve l'histoire de Josias en 2 Rois 22, 1-23, 30). En 626, Jérémie commence à parler à Jérusalem. Il a 19 ans. Il participe à la réforme de Josias.
 
            L'opération la plus importante de cette réforme fut le nettoyage du temple de Jérusalem. Tout ce qui rappelait les divinités étrangères notamment les dieux assyriens fut démoli, enlevé, brûlé. Pour Josias, c'était à la fois un acte religieux et politique. Il se dégageait de la tutelle idéologique de l'Assyrie.
 
            La remise en ordre de la religion n'était qu'une étape. Josias reconstitua l'armée. Une sorte de service national au lieu des mercenaires étrangers. Il essaya de faire disparaître les désordres sociaux : la corruption des juges était quasi-unanime. Il ne restait qu'un recours au pauvre : le roi. La justice de Josias était bien connue. Jérémie en parle en termes élogieux : " Il mangeait, il buvait, mais il pratiquait la justice et le droit. Il jugeait la cause du pauvre et du malheureux" (Jer 22, 15-16).
 
 
622 : UNE DECOUVERTE INATTENDUE
 
            Un événement fortuit accentue et oriente la politique de Josias. Au cours de l'automne 622, alors que l'on travaillait à la restauration du temple, des ouvriers découvrent un livre dans les décombres. Il est vite identifié par le grand prêtre comme le "livre de la loi de Yahvé".

D'OU VENAIT DONC CE LIVRE ?
 
            Au moment de la chute de Samarie, juste un siècle plus tôt, des Lévites (ministres du culte) réfugiés du Nord, avaient emporté avec eux des textes sacrés. A partir de ces documents - en tenant compte des réalités nouvelles - ils ont rédigé ce "livre de la loi" qui eut une diffusion restreinte dans les milieux sacerdotaux. Un exemplaire fut déposé dans les dépendances du temple. Il tomba en oubli sous le long règne et la persécution de Manassé. Mais l'existence d'un tel livre restait connue. D'où l'identification du texte lorsqu'il fut retrouvé par les ouvriers de Josias.
 
 
QUE CONTENAIT CE LIVRE ?
 
            On l'appellera Deutéronome, ce qui signifie "deuxième loi". Après la libération de l'Egypte, Moïse donna aux Hébreux une première loi, une loi adaptée à la vie nomade. Mais une fois établis en Palestine de nouveaux problèmes s'étaient posés. Il fallait donc réactualiser la loi de Moïse. D'où la "deuxième loi". Pour lui donner plus d'autorité on la mettra dans la bouche de Moïse. Ce sont ces discours de Moïse, ces lois, ainsi que les bénédictions et les malédictions (Dt 28) que les ouvriers de Josias ont découvert (En gros, il s'agit de Deutéronome 5, 12 ; 26, 15 et 28). Ce livre insiste sur le culte du dieu unique Yahvé, sur l'unité du peuple, sur l'amour de Dieu pour le peuple et sur la récompense des bons et le châtiment des méchants. Il fut un instrument utile à la réforme de Josias.
 
 
609 : UN SCANDALE POUR LES CROYANTS
 
            En 609, un événement va troubler les esprits. Josias, le bon roi Josias, le roi fidèle à Yahvé, le roi de la réforme politique et religieuse, le roi auquel la théologie du Deutéronome assurait longue vie - Le bon ne doit-il pas être récompensé ? - Ce roi trouve une mort prématurée et lamentable dans un engagement militaire contre le pharaon d'Egypte. Celui-ci volait à l'aide de l'Assyrie contre une nouvelle puissance montante : Babylone. Les serviteurs de Josias transportèrent son corps dans un char. Ils le ramenèrent à Jérusalem et l'ensevelirent dans son tombeau (2 Rois 23, 30). C'est la fin de la réforme religieuse. C'est aussi la remise en cause de la théologie du Deutéronome. Un scandale pour les croyants de l'époque. La fin des illusions pour Jérémie.
 
            Le nouveau roi Yoyaquim est une créature de l'Egypte. Un vrai souverain oriental. Autoritaire, injuste, aimant le luxe, facilitant le culte des idoles. Jérémie passe dans l'opposition. Il ne mâche pas ses mots : "Malheur à qui bâtit son palais sans la justice... qui fait travailler pour rien son prochain... il aura l'enterrement d'un âne. On le traînera pour le jeter hors des portes de Jérusalem" (Jér 22, 13 et 19).
 
 
608 : NOUVELLE ATTAQUE CONTRE LE TEMPLE
 
            La réforme de Josias avait remis en honneur le culte de Yahvé au temple. Mais le temple ne jouait pas seulement un rôle religieux. C'était aussi un centre économique : il drainait l'argent des pèlerins et conservait de grands trésors. Une vraie banque. Pour certains, une "caverne aux voleurs". C'était aussi un centre étroitement lié au pouvoir. Le roi pouvait s'appuyer sur l'unité de la foi en Yahvé, manifestée par l'unité du temple pour unifier son royaume. Un Dieu. Un temple. Un roi. Un peuple. Enfin le temple jouait un rôle déterminant dans l'élaboration de la pensée religieuse. C'était le centre idéologique le plus important du pays. L'existence du temple était une assurance. N'est-il pas la demeure de Dieu ? Si Dieu habite parmi nous, qui peut nous faire du mal ? S'attaquer au temple, c'était saper les bases de la société de Juda. C'était se mettre tout le monde à dos. A son tour, Jérémie le fait : "Je vais démolir ce temple en qui vous placez votre confiance, comme j'ai démoli le sanctuaire de Silo, dit Yahvé" (Jér 7, 14).

            Une telle parole ne peut rester impunie. Le peuple, les prêtres et les prophètes se saisissent de Jérémie, ils le traînent devant le tribunal (voir Jér 26, 7-24). C'est trop fort. Cet homme d'Anatot, du village sur lequel repose la malédiction de Silo, dépasse la mesure. Il ose annoncer la destruction du temple en la comparant à la destruction de Silo par les Philistins ! C'est uniquement parce qu'il jouit de la protection d'un haut fonctionnaire et parce qu'on se souvient d'un précédent, les paroles prononcées par Michée un siècle auparavant (Mi 3, 9-11), que Jérémie sauve sa vie. Mais son calvaire ne fait que commencer.
 
 
LES DERNIERES ANNEES
 
 
JER 46, 3
 
            Quelle est cette bataille qui se prépare ? Nous sommes à Karkemish sur les bords de l'Euphrate, à la frontière actuelle de la Syrie et de la Turquie. C'est l'aube d'une bataille décisive entre les deux grands du Moyen-Orient.
 
            D'un côté, l'Egypte avec son histoire millénaire, son peuple de paysans et d'esclaves, vivant dans la vallée du Nil, son armée qui a poussé jusqu'aux bords de l'Euphrate. A la tête des troupes égyptiennes le pharaon en personne.
 
            En face, la jeune Babylonie. Une puissance qui monte dans les régions de l'Irak actuel. Une grande partie du Moyen-Orient est déjà entre ses mains. Ses troupes n'ont fait qu'une bouchée de Ninive la capitale assyrienne en 612 (Nahum 2). A la tête de l'armée babylonienne, un général en chef : Nabuchodonosor.
 
            L'enjeu ? C'est la domination sur le Moyen-Orient. Ce jour-là à Karkemish sur les bords de l'Euphrate se joue l'avenir des petits royaumes situés entre Babylone et l'Egypte. C'est là aussi que se joue l'avenir de Jérusalem. Qui va l'emporter ? (Jér 46, 3-5). Ces troupes qui fuient sont celles de Nechao, l'Egyptien. Nabuchodonosor est vainqueur. Tout le Moyen-Orient lui appartient à court ou à long terme. Il ne peut exploiter sa victoire de suite, car il vient d'apprendre la mort du roi de Babylone. En marche forcée, il rejoint la capitale et ceint la couronne royale. Jérusalem ne perd rien à attendre.
 
 
605 : QUATRIEME ANNEE DE YOYAQUIM, UN TOURNANT A JERUSALEM
 
            Le roi Yoyaquim, créature de l'Egypte, règne à Jérusalem. Bien qu'il soit à 700 km de Karkemish, son sort est joué. Jérémie continue à parler. Mais à part son intervention sur le temple il n'obtient guère de réaction. Personne ne bouge.
 
            La quatrième année de Yoyaquim, les choses vont changer. Jérémie met par écrit les paroles prononcées contre Jérusalem, Juda et les nations. Ces paroles sont lues au peuple, aux nobles et au roi. Avant, elles n'avaient pas d'impact. Voici qu'elles sont prises au sérieux. Le roi se fâche. Il détruit le livre et fait poursuivre le prophète (voir Jér 36).
 
            Pourquoi ce changement d'attitude ? Ce qui a changé ce ne sont pas les paroles de Jérémie, mais la situation international et national dans laquelle elles sont prononcées, écrites et lues. Les paroles anciennes deviennent contemporaines d'un fait nouveau. Elles prennent un sens précis. L'ennemi du Nord dont parlait le prophète a maintenant un nom : Nabuchodonosor. Tôt ou tard son armée sera aux portes de Jérusalem.

            A partir de maintenant Jérémie va annoncer de plus en plus fort la déportation et demander la soumission à Nabuchodonosor. Il joint le geste à la parole. Il brise une cruche pour montrer comment Dieu va briser Juda (Jér 19). C'est un scandale. Il est accusé de démoraliser le peuple. Il est persécuté, dénoncé, ridiculisé. Il est seul et célibataire. Il traverse une crise profonde. Il remet tout en cause. Il voudrait tout lâcher. Mais il continue. C'est plus fort que lui. On peut trouver l'expression de cette crise en Jér 11, 18 ; 12,6 ; 15, 10-21 et 20, 7-18.
 
 
597 : PREMIERE DEPORTATION
 
            Le roi de Jérusalem poussé par une grande partie de son entourage, joue la carte de l'Egypte. Il espère ainsi sauver l'indépendance nationale. Mais l'Egypte n'est qu'un roseau qui perce la main de celui qui s'appuie sur elle. Et Nabuchodonosor n'est pas homme à se laisser faire. EN 598, il envahit la Palestine. Il assiège Jérusalem, la ville tombe en 597. Le vainqueur rafle les trésors du temple. Il emmène en captivité à Babylone la famille royale et la plupart des dignitaires du royaume. Cette première déportation touche surtout les classes dominantes (2 Rois 24, 10-17).
 Gravure Gustave Doré la Bible Ancien Testament Nabuchodonosor fait tuer les fils de Sésécias devant leur père
            Le vainqueur met en place un nouveau roi, Sédécias. La situation du pays est lamentable. La campagne est dévastée. Les villes sont en ruines. Une partie de la population est en exil. Jérémie leur écrit pour leur demander de s'installer à Babylone et pour leur dire que ce sera long (Jér 29). Mais à Jérusalem les intrigues continuent. Une conspiration contre Babylone se prépare. Jérémie intervient. Il se promène dans la ville un joug sur les épaules pour annoncer la captivité (Jér 27). Il doit affronter des prophètes nationalistes (Jér 28). Il a beau se démener.
 
 
587 : DEUXIEME DEPORTATION
 
            En 589, une tentative de soulèvement provoque l'intervention des troupes babyloniennes. Jérusalem est assiégée. Un siège qui durera un an et demi. Dans la ville tout le monde est mobilisé. Chose inouïe, on décide même de libérer les esclaves pour renforcer l'armée (Jér 34). Mais l'armée de l'Egypte se met en route pour aider son alliée Jérusalem. Nabuchodonosor lève le siège pour aller se battre contre l'Egypte. A Jérusalem c'est la joie. "Gare à toi Jérémie prophète de malheur !". On démobilise. Les esclaves redeviennent esclaves. "Ils les exploitèrent de nouveau" (Jér 34, 11).
 
            L'espoir né à Jérusalem fut de courte durée. L'armée égyptienne battue, Nabuchodonosor revient. Ses troupes assiègent de nouveau Jérusalem. Des mois terribles pour le peuple et pour Jérémie qui rame toujours à contre-courant. Au moment où tout croule autour de lui, il fait un geste symbolique. Il achète le champ à un de ses cousins en lui expliquant qu'il arrivera de nouveau un temps où l'on achètera des champs en Israël (Jér 32). Il est enfermé au cachot (Jér 37, 11-21). Il est jeté dans une citerne et sauvé à la dernière minute par un serviteur noir (Jér 38, 1-13).
 
            La deuxième chute de Jérusalem est pire que la première : le temple, les palais, les maisons sont détruits systématiquement. Une deuxième colonne de déportés se met en route. Elle est formée en grande partie par des gens du peuple : ouvriers, petits artisans, paysans. Mais tout le peuple n'est pas déporté. Ceux qui restent sur place essayeront de vivre comme ils peuvent. Les déportés bousculés par les événements seront obligés de renouveler leur vision du monde et leur foi (Jér 39-40).
 
            Jérémie reste à Jérusalem. Il essaye de reconstruire avec son ami le gouverneur Guedelias. Mais celui-ci est assassiné et Jérémie est entraîné en Egypte malgré lui avec une caravane de fugitifs. Né dans un village maudit, il meurt dans le pays contre lequel il avait parlé toute sa vie. "Arracher et détruire, bâtir et planter", c'est ainsi qu'il avait compris sa mission de la part de Dieu (Jér 1, 4-10). A-t-il réussi ?

            L'histoire du royaume du Sud est racontée par les deux livres des Rois et les livres des Chroniques qui relatent deux relectures différentes de cette période. Mais ce sont surtout des textes prophétiques qui donnent un écho direct de la manière dont les événements sont vus à l'époque même. A coté d'Isaïe 1-39, de Jérémie, de Baruch son scribe, et de Michée, notons Nahum, le chantre de la chute de Ninive, Sophonie qui redonne l'espérance aux pauvres, et Habacuc qui ne se gêne pas de demander des comptes à Dieu.
Heure  
   
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Prochaine(s) Messe(s):  
  Chaque samedi à 18h00
Chaque Dimanche à 10h30

24 décembre à 17h00 : Messe de la nuit de Noël
(animée par nos amis du Pacifique)
24 décembre à 22h00 : Messe traditionnelle de la nuit de Noël
25 décembre à 10h30: Messe du jour de Noël
1er janvier à 10h30 : Messe de Sainte MArie Mère de Dieu
18 février à 10h30 : Messe des Cendres
02 avril à 18h00 : Messe du Jeudi Saint
03 avril à 18h00 : Office de la Passion
04 avril à 18h00 : Vigile Pascale
05 avril à 10h30 : Messe de Pâques
13 mai à 18h00 : Messe anticipée de l'Ascension
23 mai à 10h30 : Messe de la 1ère communion (1ère partie)
31 mai à 10h30 : Messe de la 1ère communion (2ème partie)

Les 14, 16 et 17 mai mai, en raison du PMI à Lourdes, il n'y aura pas de messes

15 août à 10h30 : Messe de l'Assomption
1er novembre : Messe de la Toussaint
02 novembre à 18h00 : Messe des Défunts
 
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